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Portraits

Les Pétales du Désir : le premier court-métrage d’Émile Parcelier, réalisateur et lycéen à Pasteur en spécialité cinéma

C'est le 28 février, dans le cadre d'une soirée projection de courts-métrages, que nous faisons la rencontre d'Emile. Il est passionné de cinéma et se sert de la réalisation pour adoucir ses maux en abordant de lourdes thématiques, telles que le suicide.


Charlotte Trivès
Le 16 mars 2023 à 14h53

De jeunes cinéastes se sont retrouvés aux alentours de 19h mardi 28 février à la médiathèque Pierre Bayle pour la projection de leurs courts-métrages. Une soirée articulée en trois temps : une projection des 10 courts-métrages, un temps d’échange avec les réalisateurs amateurs (durant lequel ils ont pu présenter leur projet et leur façon de travailler), et un moment convivial autour d’un verre. C’est alors que nous faisons la rencontre de Émile. À 17 ans, il est en classe de première générale au Lycée Pasteur de Besançon, en spécialité Cinéma-Audiovisuel. Passionné de cinéma, Émile est venu présenter son film Les Pétales du Désir.

Affiche « Les Pétales du Désir »

Parle-nous de ton court-métrage Les Pétales du Désir. Quelles ont été tes inspirations concernant son sujet et la manière de le réaliser ?

« Les Pétales du Désir est né à la suite du visionnage du film Les Ailes du Désir, grand classique et pas moins chef-d’œuvre de Wim Wenders. J’ai alors décidé de narrer le destin d’un jeune homme qui, à la suite de son suicide, est condamné à errer indéfiniment dans les ruines inhabitées de sa maison, voyant une seconde chance lui être attribuée par la vie afin de renaître empli d’épanouissement. C’est une situation qui faisait écho à mon état psychologique momentané, étant donné que lors de la production de ce court-métrage, j’étais dépressif et convoitais le néant. Mais j’ai avant tout souhaité percevoir une issue possible à la dépression, un rayon de lumière que chacun s’approprierait à sa façon au travers de l’image d’une fleur. Cette fleur aura à titre personnel été l’Art et la création de ce film. En ce qui concerne mes autres inspirations, elles sont d’abord d’ordre visuel. Le génie de Cocteau, Michel Gondry ou encore Jean-Pierre Jeunet et leur univers décalé ont aussi eu leur part d’exercice sur mon esprit créateur. Le noir et blanc morose et les contrastes qu’il produit constituent une symbolique supplémentaire, celle du double (qui m’est très chère), de la binarité émotionnelle. »

Dans le film, on découvre de jolis effets spéciaux, comme lorsque tu te retrouves à marcher sur un vinyle qui tourne. C’est toi qui réalise ces effets ?

« J’ai en effet réalisé ces effets spéciaux. Il faut savoir que lorsque j’étais petit, ma fascination pour les films fantastiques me propulsait à créer moi-même d’infimes court-métrages dotés de fantaisies hors de l’ordinaire. Cette période a été extrêmement enrichissante pour moi, pour la simple et bonne raison que j’ai rencontré un nombre dense d’échecs. Les échecs sont nécessaires, bénéfiques. Bien qu’ils nous blessent profondément, sans eux, je n’aurais pas développé cette réflexion plus intense quant à mes trucages. Il est un second engrenage, celui du budget. Le manque de budget est peut-être la plus grande des opportunités, car elle donne à réfléchir, et tend à la débrouillardise (mon moi de dix ans utilisant un rideau de douche comme fond vert pourrait en être témoin). Si j’avais eu de l’argent et aucune expérience passée, l’aspect visuel des Pétales du Désir aurait été assurément moins travaillé. »

Comment as-tu produit ton film ?

« J’ai produit ce film entièrement seul, du tournage à la post-production. Aussi, l’avancée de mes travaux reste très confidentielle, j’évite à tout prix que quiconque interagisse avec mon processus créatif, sûrement par besoin de légitimité d’attribution du produit final, par orgueil en quelque sorte. Donc je dissimule pendant plusieurs mois toutes mes avancées à mes parents, phénomène compliqué lorsque l’on vit sous le même toit ! Mais je leur suis abondamment reconnaissant pour leur compréhension et leur absence de questionnements à mon égard. Et malgré leur distance vis-à-vis du chemin parcouru, je leur dois beaucoup quant à l’acquisition du matériel utilisé. Il se trouve que mes parents ont adorablement répondu à mes caprices au fil du temps, m’offrant un appareil photo ou un fond vert, pour ne citer que l’essentiel. C’est grâce à ces cadeaux de leur part que j’ai eu l’occasion de tourner ce court-métrage, muni de ma caméra et d’une lampe maniable (qui a permis, avec réflexion et tâtonnements, d’aboutir aux contrastes recherchés) pour la totalité des plans. En revanche, ni microphone externe, ni lumières professionnelles n’ont été employés, ce projet relevant d’une certaine modestie de moyens. »

D’où te vient ta passion pour la réalisation et le jeu ? Car rappelons-le, tu es l’acteur principal de ton court-métrage.

« Durant mon enfance, j’étais fasciné par les poupées. Si fasciné que j’en venais à admirer de façon chronophage des vidéos – sur les premiers émois de Youtube – mettant en scène des figurines prenant vie avec la technique de stop motion (animation d’un sujet image par image, NDLR). J’ai très vite commencé à expérimenter cette méthode, je devais alors être âgé de sept ans. À la suite de cet apprentissage m’est venue l’envie de réaliser des courts-métrages en prises de vues réelles : c’est accompagné de mes cousins que j’ai découvert les possibilités tellement diverses qu’un téléphone portable pouvait ouvrir. Puis, au fur et à mesure, ma cinéphilie s’est développée, et les désirs de mise en scène ne m’ont jamais quitté. Néanmoins, je ne porte aucun intérêt pour le jeu. C’est surtout par nécessité que je porte la casquette d’acteur dans mes propres films. J’ai d’ailleurs pris l’habitude d’écrire des scénarios incluant un unique personnage afin de le jouer moi-même, parce que je préfère la solitude.

As-tu d’autres projets en tête que tu aimerais réaliser ? 

« Je suis actuellement en production d’un second court-métrage, réalisé seul à nouveau, qui devrait voir le jour à l’automne prochain. Un projet sûrement plus ambitieux, toutefois pas à la hauteur des Pétales du Désir, mais qui sait ? Le public en jugera lui-même. En tout cas, à l’avenir, il me tente, me semble indispensable et très excitant de collaborer avec de jeunes cinéphiles emplis de motivation. La région regorge de talents et je rêverais de participer à l’exploitation de ce potentiel ! »

À terme, tu aimerais essayer de faire du cinéma, ton métier ? 

« Aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours eu vocation à devenir réalisateur professionnellement. Je souhaite éminemment poursuivre mes études dans le domaine du cinéma, et bien qu’une infinité de métiers dans ce milieu m’intéressent, celui de metteur en scène est irrévocablement mon idéal à atteindre. L’avenir seul est maître de ces volontés ! »


La projection fut riche en diversité, les jeunes réalisateurs âgés de 16 à 20 ans ont tous leurs styles bien définis. Durant les questions réponses avec le public, nous en avons appris davantage sur la manière de procéder des jeunes talents. À l’opposé de Émile, certains privilégient le travail en collaboration, comme l’équipe du lycée Pasteur qui présentait son court métrage Bref : je suis lycéen. Les deux créateurs du film, Baptiste Cruypenynk et Noémie Sylla, partagent la même passion et suivent tous deux l’option cinéma.

La soirée a eu la chance d’accueillir l’avant-première du film Bogatyr, de Erik Sémashkin. Un choix de calendrier qui n’est pas anodin, nous précise le réalisateur, d’origine ukrainienne, qui souhaitait que son film voit le jour pour les un an de la guerre en Ukraine.

Une partie des films présentés lors de la projection étaient issus de la sélection de la dernière édition du concours Tremplin, qui s’est déroulé le 17 juin 2022 à l’Espace des 2 Scènes, à Besançon. En somme, une soirée riche culturellement et artistiquement, qui se conclut par un échange dans l’entrée de la médiathèque Pierre Bayle.



Charlotte Trivès

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